Les heritiers sont ils responsables des penalites fiscales du defunt ?? (17 mars 2023)

Declaration_des_Droits_de_l'Homme_et_du_Citoyen_de_1793.jpgNous  rappelons les regles applicables dans cette situation qui semble etre de plus en plus fréquente

A titre d’exemple, une personne décédée laisse  des comptes  étrangers non déclarés Les héritiers sont ils responsables  des amendes et pénalités fiscales faisant suite à la vérification  du compte étranger non déclaré par le defunt  mais   déclaré dans la déclaration de succession  ????

Article 1754 V  du CGI  dispose en effet  

IV.-En cas de décès du contrevenant ou s'il s'agit d'une société, en cas de dissolution, les amendes, majorations et intérêts dus par le défunt ou la société dissoute constituent une charge de la succession ou de la liquidation.

 

La  CAA Lyon, 28 juin 2011, n° 09LY00328 a jugé 

  le principe de personnalité des peines ne fait pas obstacle à ce qu'en l'espèce, ces pénalités aient été infligées, antérieurement à leur décès, aux époux A, auteurs des manquements ayant servi de fondement à ces majorations, et à ce que les créances résultant de ces sanctions soient, dans le cadre de l'exécution de ces pénalités dans le patrimoine des époux A, affectées au passif de la succession qui en supportera la charge ;

ce principe ne s'oppose pas à l'exécution de la sanction prononcée antérieurement au décès du contribuable dans le patrimoine de l'intéressé ; 

en pourvoi de cet arret, le conseil d etat a saisi le 22 fevrier 2012 le conseil constitutionnel  dune QPC   relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du IV de l'article 1754 du code général des impôts (CGI

Cette disposition est elle compatible avec les  articles 8 et 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, selon lequel

« nul ne peut être punissable que de son propre fait » 

La jurisprudeence de la CEFH

la CEDH a rappelé  dans sa jurisprudence Bendenoun contre France4 que  les pénalités fiscales font partie de la matière pénale et sont, à ce titre, notamment soumises aux exigences du procès équitable. 

CEDH, 24 février 1994, Bendenoun c/ France, aff. n° 12547/86. 

Puis elle a affirmé,  qu’ « il existe une règle fondamentale du droit pénal, selon laquelle la responsabilité pénale ne survit pas à l’auteur de l’acte délictueux »5 

  1. CEDH, 29 août 1997, E.L., R.L. et J.O.-L. contre Suisse,aff. 75/1996/694/886   

. On ne peut donc, selon elle, infliger de sanctions fiscales aux héritiers de l’auteur de la fraude.
Suivant la CEDH, la personnalité des peines fait obstacle à ce que les héritiers se voient infliger des sanctions fiscales pour des faits commis par le défunt ; mais elle ne s’oppose pas à ce que les sanctions fiscales définitivement prononcées à l’encontre du contrevenant fiscal soient recouvrées auprès de ses héritiers. 

La jurisprudence de la cour de cassation

La chambre criminelle de la Cour de cassation a, quant à elle, dans un arrêt du 13 mars 1997, jugé que le décès d’une personne poursuivie au cours de la procédure éteint, en vertu de l’article 6 du code de procédure pénale, l’action en application des sanctions fiscales menée contre elle. Cela étant, elle n’a en rien exclu la possibilité de recouvrer contre les héritiers les pénalités définitivement prononcées, de son vivant, à l’endroit du défunt.

Cass.crim., 13 mars 1997, bull.crim. n°104, pourvoi n° 95-85034.  

 

 La QPC du 4 mai 2012

dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la constitution l’article 1754 IV du code général des impôts.

le Conseil a , dans sa décision du 4 mai 2012, distingué les majorations et intérêts de retard des amendes et majorations tendant à sanctionner les contrevenants fiscaux. 

Décision n° 2012-239 QPC du 4 mai 2012 

Commentaire de la Décision n° 2012-239 QPC du 4 mai 2012

Pour les premiers, le Conseil a jugé qu’ils ont « pour seul objet de réparer le préjudice subi par l’État du fait du paiement tardif de l’impôt » et qu’en cela, ils « ne revêtent aucun caractère punitif ». Par conséquent, le Conseil a considéré que « le grief tiré de la méconnaissance des articles 8 et 9 de la Déclaration de 1789 est inopérant à leur égard » (cons. 4). 

Pour les secondes, le Conseil a affirmé qu’elles « doivent, quant à elles, être considérées comme des sanctions ayant le caractère d’une punition » auxquelles s’applique, en conséquence, « le principe selon lequel nul n’est punissable que de son propre fait » (cons. 5).

le Conseil a donc jugé qu’« en prévoyant que ces pénalités de nature fiscale, entrées dans le patrimoine du contribuable ou de la société avant le décès ou la dissolution, sont à la charge de la succession ou de la liquidation, les dispositions contestées ne méconnaissent pas le principe selon lequel nul n’est punissable que de son propre fait » (cons. 7). 

EN clair , les penalites  entrées  c'est-à-dire notifées ( ?) après le deces sont contraires à la déclaration des droits de l Homme et doivent etre annulées 

En conclusion

Ainsi, le conseil constitutionnel ,la CEDH, le Conseil d’État et la Cour de cassation développent, à quelques nuances près, une même conception du principe de personnalité des peines : celui-ci fait obstacle au prononcé des peines pécuniaires contre les continuateurs de la personne physique ou morale mais non au recouvrement de ces peines prononcées de leurs vivants  contre ces derniers.

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