Art 57 : La pratique de détermination (12 novembre 2009)

camion.jpgL’arrêt de la CAA de Versailles est intéressant parce qu’il précise avec détails les conditions pratiques de détermination d’un bénéfice transféré au sens de l’article 57 CGI et ce dans le cadre de l’union européenne.                                                

                                           

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Les tribunes EFI sur l’article 57

 

CAA VERSAILLES  5 Mai 2009 n° 08VE02411 aff Man Camions 

 

 

Conclusions de Mr Brunelli 

 

La situation de fait 

 

La société Man Camions et Bus, filiale de la société allemande Man Nutzfahrzeuge, a pour activité exclusive la distribution des véhicules poids lourds fabriqués par sa société mère sur le marché français 

Pour fixer le prix des achats de véhicules auprès de sa société mère au cours des exercices vérifiés, elle a utilisé la méthode du prix de revente, en minorant le prix facturé à ses clients d’une marge de 28,86 % en 1997 et de 31,71 % en 1998, laquelle a été déterminée par comparaison avec les marges brutes réalisées par neuf entreprises françaises exerçant l’activité de distributeur ou de concessionnaire de véhicules ;

 À la suite de la vérification de comptabilité dont la société requérante a fait l’objet, le service a estimé que les termes de comparaison choisis par la société n’étaient pas pertinent dès lors, notamment, que ces entreprises n’exerçaient pas l’activité d’importateur de véhicules ;

 

En se fondant sur une méthode alternative, tirée de l’étude des marges transactionnelles nettes pratiquées par des entreprises réputées comparables, l’administration a considéré que les prix d’achat pratiqués par la société Man Camions et Bus auprès de sa société mère révélaient un transfert indirect de matière imposable à l’étranger au sens des dispositions de l’article 57 du code général des impôts et a redressé en conséquence les résultats des exercices clos en 1998 et 1999 ;

 

Pour établir le transfert de bénéfices allégué, l’administration a comparé le résultat courant avant impôt de la société requérante avec ceux de cinq entreprises opérant sur le marché européen ;

 toutefois, deux de ces sociétés, qui importent des véhicules d’origine suédoise, ne sont pas dépourvues de lien de dépendance et ne peuvent être regardées comme exploitées normalement au sens de l’article 57 du code général des impôts 

 

s’agissant des trois autres entreprises opérant sur les marchés néerlandais, italien et portugais, la société Man Camion et Bus fait valoir que la situation du marché français de distribution automobile n’est pas comparable à celle des marchés européens étudiés par le service, du fait de la position particulière de l’entreprise Renault véhicules industriels, qui bénéficie, en raison de son ancienneté et de ses parts de marché, d’une position particulière ayant une incidence sur les prix ;

 

La charge de la preuve

 

’Il appartient à l’administration, sur qui repose la charge de la preuve de l’existence d’avantages consentis par l’entreprise, d’établir en quoi les méthodes et éléments de comparaison qu’elle propose pour démontrer celle-ci revêtent un caractère pertinent ; q

 

’Il lui appartient notamment de démontrer, dans le cas où la méthode en cause repose sur la comparaison avec des entreprises opérant sur des marchés étrangers, que lesdits marchés présentent des caractéristiques proches du marché français ;

 

La position de la cour sur la preuve

 

contrairement à ce que soutient l’administration, la société Renault véhicules industriels est un opérateur concurrent de la société Man Camion et Bus sur le marché français de la distribution de véhicules poids lourds ;

si l’administration soutient que la situation du marché français pour ces véhicules est économiquement très proche de celle des autres marchés européens, elle ne fournit aucune donnée susceptible d’étayer, même sommairement, cette affirmation ;

 

en l’absence de précisions ou de justifications de nature à démonter la similarité des marchés concernés, d’une part, et à remettre en cause l’argumentation circonstanciée de la société Man Camion et Bus relative à l’incidence sur les prix de la présence d’un opérateur en situation particulière sur le marché français, d’autre part, l’administration n’apporte pas la preuve de la pertinence des termes de comparaison qu’elle invoque ;

 

 

Par ailleurs si l’administration produit, pour la première fois en appel, une liste de huit nouvelles entreprises opérant sur des marchés européens qui présenteraient des caractéristiques similaires à la société Man Camions et Bus et soutient que le rapport entre le résultat comptable avant impôts de ces entreprises et leur chiffre d’affaires pour 1996 et 1997 est systématiquement supérieur à celui de l’entreprise vérifiée, il n’est pas davantage établi que les marchés sur lesquels opèrent ces entreprises soient comparables au marché français ;

Or aucune analyse fonctionnelle de ces sociétés n’est produite ;

 

la société Man Camions et Bus soutient, sans être contredite, qu’aucune de ces entreprises n’exerce exclusivement des fonctions de distributeur de poids lourds ;

 

en particulier, une de ces sociétés est une holding exerçant des activités diversifiées, notamment dans le domaine des véhicules légers, et qu’une des autres vend également des véhicules agricoles ;

 

ainsi, les éléments apportés par l’administration ne permettent pas davantage de considérer qu’il s’agirait d’entreprises similaires exploitées normalement et dont les résultats permettraient, par comparaison, d’établir l’existence d’un avantage consenti par la société Man Camions et Bus ;

 

enfin,la circonstance que la société Man Camions et Bus ait subi des pertes plusieurs années de suite, si elle peut constituer un indice d’un transfert de bénéfices, n’est pas de nature, à elle seule, à démontrer l’existence et le montant de ce transfert, dès lors que cette situation déficitaire peut résulter d’autres facteurs économiques ou d’une stratégie d’implantation sur le marché français ;

 

Par suite le ministre n’est pas fondé à soutenir que c’est par une application erronée de l’article 57 du code général des impôts sur le Tribunal administratif de Versailles a, par le jugement attaqué, opéré la décharge des impositions contestées ;

 

son recours doit dès lors être rejeté ;

 

art57doc  art57 ARTICLE 57.doc

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