14 octobre 2009
le conseil n'est pas responsable de l'opportunité MAIS
L'arrêt de la première civile du 28 mai 2009 pourra être marbré dans le futur recueil des grands arrêts tant la synthèse ciselée de la responsabilité d'un conseil est à la fois large et précise.
Les limites de notre obligation de moyen renforcée sont exactement bornées.
Les tribunes EFI sur la responsabilité des conseils
Un vieux classique.les avocats sont ils des canards de foire? cliquer
le conseil - en l'espèce un notaire- n’est pas tenu d’une obligation de conseil et de mise en garde concernant l’opportunité économique d’une opération en l’absence d’éléments d’appréciation qu’il n’a pas à rechercher,
Il est, en revanche, tenu d’une telle obligation pour que les droits et obligations réciproques légalement contractés par les parties
- répondent aux finalités révélées de leur engagement,
- soient adaptés à leurs capacités ou facultés respectives et
- soient assortis des stipulations propres à leur conférer leur efficacité, quand bien même leur engagement procéderait d’un accord antérieur
Cour de cassation chambre civile 1 28 mai 2009 N° 07-14075 07-14644
LES FAITS
L’EURL “ La Brocherie Saint Basile “ a cédé, en août 1991, aux consorts Y... un fonds de commerce de restaurant sous la condition suspensive de l’octroi d’un prêt ;
le prêt n’ayant pas été obtenu, un accord est intervenu, le 24 octobre 1991, entre les parties par lequel il a été convenu que les époux X... et l’EURL “ La Brocherie Saint Basile “ donnerait le fonds de commerce en location-gérance aux consorts Y..., pour une durée de vingt-quatre mois à compter du 1er janvier 1992, avec promesse de vente, les époux Y... s’obligeant à consentir aux époux X... un prêt de un million de francs destiné au paiement à due concurrence du passif de l’EURL et garanti par une hypothèque sur les biens immobiliers des emprunteurs, le tout sous la condition suspensive que les époux Y... obtiennent un prêt relais garanti par un bien immobilier leur appartenant ;
Le 18 décembre 1991, par acte reçu par M. Z..., notaire, Mme Y... et ses deux fils ont constitué la société en nom collectif “ Brocherie Saint Basile “ pour l’exploitation du fonds de commerce et, le même jour, devant le même notaire, a été conclu l’acte de location-gérance entre l’EURL et la SNC ;
par acte dressé, le 26 février 1992, par M. Z..., la société Centrale de banque a prêté à la SNC la somme de un million de francs, garantie à la fois par le cautionnement solidaire des époux Y..., qui ont hypothéqué un bien immobilier pour sûreté de l’exécution de leur engagement de caution, et par le cautionnement solidaire des époux X..., qui ont eux-mêmes hypothéqué un bien immobilier pour garantir l’exécution de leur engagement de caution ; que, par acte du même jour, dressé par le même notaire, la SNC “ Brocherie Saint Basile “ a prêté, pour être apportée à l’EURL “ La Brocherie Saint Basile “, la somme de un million de francs aux époux X..., sous la garantie hypothécaire constituée sur un bien immobilier appartenant à ces derniers et évalué à 800. 000 francs ;
à la suite de difficultés de trésorerie apparues dès 1992, la SNC “ Brocherie Saint Basile “ ayant cessé de payer les redevances en janvier 1993, le contrat de location gérance a été résilié et la SNC et les associés ont été expulsés du local et mis en redressement judiciaire, puis en liquidation judiciaire en juin 1993 ;
le liquidateur judiciaire, M. A..., la SNC “ Brocherie Saint Basile “ et les consorts Y... ont recherché la responsabilité du notaire, M. Z..., d’un conseiller financier consulté par les époux Y..., M. B..., pour manquement à leur obligation de conseil, et du cabinet d’expertise comptable C... , devenu la société Azurex, pour avoir fourni de faux bilans qui avaient permis la signature dolosive du contrat de location-gérance ;
La Cour d’appel d’Aix-en-Provence du 1 février 2007 a jugé que la société Azurex et M. Z. ont commis des fautes professionnelles ayant causé un préjudice aux consorts Y...
La cour de cassation confirme l ‘arrêt de la cour d’appel sur le motif suivant
attendu que si le notaire n’est pas tenu d’une obligation de conseil et de mise en garde concernant l’opportunité économique d’une opération en l’absence d’éléments d’appréciation qu’il n’a pas à rechercher,
il est, en revanche, tenu d’une telle obligation pour que les droits et obligations réciproques légalement contractés par les parties répondent aux finalités révélées de leur engagement, soient adaptés à leurs capacités ou facultés respectives et soient assortis des stipulations propres à leur conférer leur efficacité, quand bien même leur engagement procéderait d’un accord antérieur, dès lors qu’au moment de l’authentification cet accord n’a pas produit tous ses effets ou ne revêt pas un caractère immuable ;
qu’ayant relevé que M. Z... avait été le rédacteur de l’ensemble des actes ayant permis la réalisation de l’opération litigieuse, sans que le protocole d’accord antérieur dont celle-ci procédait en eut immuablement arrêté les modalités ni eut prévu la constitution de la SNC, et estimé que cette opération était à l’évidence peu sûre, la cour d’appel, en considération des droits et obligations respectifs des parties, constituant l’économie générale de l’opération, et de l’insuffisance du gage garantissant le prêt consenti aux époux X... par les consorts Y..., eux-mêmes engagés indéfiniment et solidairement en tant qu’associés de la SNC ainsi que personnellement obligés envers la Centrale de banque par un cautionnement solidaire, a pu en déduire, sans devoir procéder aux recherches prétendument omises, qui ne lui étaient pas demandées, relatives, d’une part, aux avantages fiscaux de la forme sociale adoptée que le notaire ne justifiait pas avoir mis en rapport avec l’engagement indéfini qui en résultait ni avec les avantages et inconvénients d’une autre structure juridique, et, d’autre part, aux éventuelles exigences de la banque prêteuse de bénéficier d’un engagement personnel des associés, au demeurant déjà satisfaites par le cautionnement solidaire des emprunteurs, que le notaire, que l’indication claire de la valeur de l’immeuble hypothéqué ne dispensait pas d’attirer l’attention sur sa disproportion avec le montant du prêt garanti qui ajoutait aux risques de l’opération globale, avait méconnu son obligation de conseil et de mise en garde ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne M. Z... et la société Azurex aux dépens ;
07:38 Publié dans aa)DEONTOLOGIE, Déontologie de l'avocat fiscaliste, Responsabilité | Tags : cour de cassation chambre civile 1 28 mai 2009 n° 07-14075 07-14 | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook | | |
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