29 octobre 2018

La sous évaluation d un usufruit temporaire est elle un revenu distribué (CE 24/10/2018)

abus de droit grandage.jpgLa société civile Sacajisme, soumise à l'impôt sur les sociétés, et la société civile immobilière (SCI) Sacaj, soumise au régime fiscal des sociétés de personnes prévu à l'article 8 du code général des impôts, ont acquis, par acte du 4 septembre 2008, respectivement l'usufruit, pour une durée de vingt-deux années, et la nue-propriété d'un immeuble sis 13 rue Tronchet à Paris pour un prix total de 730 000 euros.

A l'issue d'une vérification de comptabilité de la société Sacajisme, l'administration a estimé que le prix de 645 000 euros qu'elle avait acquitté pour acquérir l'usufruit excédait de 145 000 euros la valeur de celui-ci et que l'excédent de prix ainsi consenti constituait une libéralité accordée à la SCI Sacaj, nue-propriétaire.

En conséquence, Mme B... et M. C..., associés à parts égales de la SCI Sacaj et associés par ailleurs à parts inégales de la société Sacajisme, ont été imposés, au titre de l'année 2008, sur le fondement du c de l'article 111 du code général des impôts, à raison des revenus distribués correspondant à cette libéralité retenue par administration.

Par des jugements du 29 septembre 2015, le TA de Strasbourg a, sur demande respectivement de Mme B...et de M. C..., prononcé la décharge des impositions litigieuses. Par des arrêts du 11 mai 2017, la CAA  de Nancy a rejeté les recours du ministre des finances et des comptes publics contre ces jugements.

Le conseil d etat confirme l’administration

Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 24/10/2018, 412322,   

Le principe dégagé par le conseil d etat


En cas d'acquisition par des personnes distinctes de l'usufruit temporaire et de la nue-propriété du même bien immobilier, le caractère délibérément majoré du prix payé pour l'acquisition de l'usufruit temporaire par rapport à la valeur vénale de cet usufruit, sans que cet écart de prix ne comporte pour l'usufruitier de contrepartie, révèle, en ce qu'elle conduit à une minoration à due concurrence du prix acquitté par le nu-propriétaire pour acquérir la nue-propriété par rapport à la valeur vénale de celle-ci, l'existence, au profit du nu-propriétaire, d'une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices au sens des dispositions précitées du c de l'article 111 du code général des impôts.

 La preuve d'une telle distribution occulte doit être regardée comme apportée par l'administration lorsqu'est établie l'existence,

-d'une part, d'un écart significatif entre les prix convenus et les valeurs vénales respectives de l'usufruit et de la nue-propriété,

- d'autre part, s'agissant des parties au démembrement du droit de propriété, de l'intention de l'usufruitier d'octroyer, et pour le nu-propriétaire, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de l'acquisition dudit bien. 

La position du CE dans le cas d’espèce 

 En l'absence de toute transaction ou de transaction équivalente, l'appréciation de la valeur vénale doit être faite en utilisant les méthodes d'évaluation qui permettent d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande à la date où l'acquisition est intervenue.

Dans le cas de l'acquisition d'un bien en démembrement de propriété, constitue une telle méthode d'évaluation celle qui définit des prix de la nue-propriété et de l'usufruit tels qu'ils offrent le même taux de rendement interne de l'investissement pour l'usufruitier et le nu-propriétaire.

 

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