Rétroactivité de la loi :jurisprudence du conseil constitutionnel

 

Jurisprudence du Conseil constitutionnel

 

  1. a.     Jurisprudence relative au principe de non rétroactivité de la loi

 

Décision n° 99-425 DC du 29 décembre 1999, Loi de finances rectificative pour 1999

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8. Considérant que, si le législateur peut valider un acte administratif dans un but d'intérêt général suffisant, c'est sous réserve du respect des décisions de justice ayant force de chose jugée et du principe de non rétroactivité des peines et des sanctions ; que l'acte validé ne doit méconnaître aucune règle, ni aucun principe de valeur constitutionnelle, sauf à ce que le but d'intérêt général visé par la validation soit lui-même de valeur constitutionnelle ; qu'en outre, la portée de la validation doit être strictement définie, sous peine de méconnaître l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; que c'est à la lumière de l'ensemble de ces principes que doit être appréciée la conformité à la Constitution des dispositions soumises à l'examen du Conseil constitutionnel ;

9. Considérant que le A du II de l'article 25 valide " sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les avis de mise en recouvrement émis avant le 1er janvier 2000 en tant qu'ils seraient contestés par le moyen tiré de l'incompétence territoriale de l'agent qui les a émis, à la condition qu'ils aient été établis soit par le comptable public du lieu de déclaration ou d'imposition du redevable soit, dans le cas où ce lieu a été ou aurait dû être modifié, par le comptable compétent à l'issue de ce changement, même si les sommes dues se rapportent à la période antérieure à ce changement. " ;

10. Considérant que les requérants font valoir à l'encontre de cette validation que " le gouvernement n'a donné aucune information sur les montants financiers en jeu ", alors que de telles validations ne " devraient intervenir que de manière exceptionnelle, lorsque l'intérêt général l'exige de manière impérieuse " ;

11. Considérant que, par cette validation, le législateur a entendu éviter que ne se développent, pour un motif tenant à la compétence territoriale de l'autorité ayant établi l'avis de mise en recouvrement, des contestations dont l'aboutissement aurait pu entraîner, pour l'Etat, des conséquences gravement dommageables ; que l'intérêt général qui s'attache à une telle validation l'emporte sur la mise en cause des droits des contribuables qui résulterait de l'irrégularité de pure forme que la validation a pour effet de faire disparaître ; que cet intérêt général réside tant dans le montant des sommes en cause que dans la prévention des troubles qu'apporterait à la continuité des services publics fiscaux et juridictionnels concernés la multiplication de réclamations pouvant, en vertu du livre des procédures fiscales, être présentées pendant plusieurs années ; que la disposition critiquée n'a ni pour objet, ni pour effet de valider des impositions annulées par des décisions juridictionnelles ayant force de chose jugée ; qu'elle sauvegarde les droits des contribuables nés de telles décisions ; que la validation est strictement limitée dans sa portée puisqu'elle n'a pas pour objet de purger les impositions en cause d'autres vices que celui tenant à l'incompétence territoriale de l'autorité qui a émis l'avis de mise en recouvrement ; que cette disposition ne déroge pas davantage au principe de non rétroactivité des textes à caractère répressif plus sévères, ni à son corollaire qui interdit de faire renaître une prescription légalement acquise ; qu'enfin, à défaut de validation, la restitution aux intéressés d'impositions dont ils sont redevables au regard des règles de fond de la loi fiscale pourrait constituer un enrichissement injustifié ; qu'ainsi le A du II de l'article 25 n'est contraire à aucune règle non plus qu'à aucun principe de valeur constitutionnelle ;

(…)16  

Décision n° 2002-458 DC du 7 février 2002, Loi organique portant validation de l'impôt foncier sur les propriétés bâties en Polynésie française

(…)

3. Considérant, d'autre part, que, si le législateur peut, comme lui seul est habilité à le faire, valider un acte administratif dans un but d'intérêt général suffisant, c'est sous réserve du respect des décisions de justice ayant force de chose jugée et du principe de non-rétroactivité des peines et des sanctions ; que l'acte validé ne doit méconnaître aucune règle, ni aucun principe de valeur constitutionnelle, sauf à ce que le but d'intérêt général visé par la validation soit lui-même de valeur constitutionnelle ; qu'en outre, la portée de la validation doit être strictement définie, sous peine de méconnaître l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; que c'est à la lumière de l'ensemble de ces principes que doit être appréciée la conformité à la Constitution des dispositions soumises à l'examen du Conseil constitutionnel ;

4. Considérant que, par cette validation, le législateur organique a entendu éviter que ne se développent des contestations pouvant entraîner des conséquences gravement dommageables en Polynésie française ; qu'en effet, près d'un millier de réclamations sont d'ores et déjà déposées ; que pourraient se trouver ainsi compromis la continuité du service public des impôts ainsi que le bon fonctionnement du service public de la justice administrative dans le territoire, eu égard aux moyens dont disposent ces services ; que l'intérêt général qui s'attache à une telle validation l'emporte sur la mise en cause des droits des contribuables qui résulterait de l'irrégularité de pure forme que la validation a pour effet de faire disparaître ; que la disposition critiquée n'a ni pour objet, ni pour effet de valider des impositions annulées par des décisions juridictionnelles ayant force de chose jugée ; qu'elle est strictement limitée dans sa portée ; qu'elle ne déroge pas davantage au principe de non-rétroactivité des textes à caractère répressif plus sévères, ni à son corollaire qui interdit de faire renaître une prescription légalement acquise ; qu'enfin, à défaut de validation, la restitution aux intéressés d'impositions dont ils sont redevables en vertu des règles de fond de la loi fiscale pourrait constituer un enrichissement injustifié ; qu'ainsi, en tant qu'il concerne les années 2000 et 2001, l'article unique précité n'est contraire à aucune règle non plus qu'à aucun principe de valeur constitutionnelle ;

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Décision n° 2010-2 QPC du 11 juin 2010, Mme Vivianne L. [Loi dite "anti-Perruche"]

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21. Considérant qu'aux termes de l'article 16 de la Déclaration de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution » ;

22.Considérant en conséquence que, si le législateur peut modifier rétroactivement une règle de droit ou valider un acte administratif ou de droit privé, c'est à la condition de poursuivre un but d'intérêt général suffisant et de respecter tant les décisions de justice ayant force de chose jugée que le principe de non-rétroactivité des peines et des sanctions ; qu'en outre, l'acte modifié ou validé ne doit méconnaître aucune règle, ni aucun principe de valeur constitutionnelle, sauf à ce que le but d'intérêt général visé soit lui-même de valeur constitutionnelle ; qu'enfin, la portée de la modification ou de la validation doit être strictement définie ;

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Décision n° 2010-53 QPC du 14 octobre 2010, Société PLOMBINOISE DE CASINO [Prélèvements sur le produit des jeux]

(…)

3. Considérant qu'aux termes de l'article 16 de la Déclaration de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution » ;

4. Considérant, en conséquence, que, si le législateur peut modifier rétroactivement une règle de droit ou valider un acte administratif ou de droit privé, c'est à la condition de poursuivre un but d'intérêt général suffisant et de respecter tant les décisions de justice ayant force de chose jugée que le principe de non-rétroactivité des peines et des sanctions ; qu'en outre, l'acte modifié ou validé ne doit méconnaître aucune règle, ni aucun principe de valeur constitutionnelle, sauf à ce que le but d'intérêt général visé soit lui-même de valeur constitutionnelle ; qu'enfin, la portée de la modification ou de la validation doit être strictement définie ;

(…)

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