15 juillet 2022

Art 123 bis CGI comment déterminer les revenus d’entitées situées dans un etat privilégié ? le résultat comptable ou le résultat fiscal ? CE 21 juin 2022 Stanmer Gibraltar Conc Guibé

societe ecran.jpgL..., qui réside à Paris, contrôle plusieurs entités, parmi lesquelles la société Kerauf, établie au Luxembourg, et la société Stanmer Holdings Ltd, enregistée à Gibraltar. Il conduit par ailleurs une activité de construction-vente de centres commerciaux en Bulgarie. A l’issue d’un ESFP et d’un contrôle sur pièces, l’administration fiscale a estimé qu’il était fiscalement domicilié en France au titre des années 2008 à 2013 et non en Bulgarie, comme il le prétendait. Elle a rehaussé les revenus imposables de son foyer fiscal à hauteur, d’une part, de revenus distribués par la société luxembourgeoise, et, d’autre part, des bénéfices réalisés par la société Stanmer, qu’elle a réputé constituer des revenus de capitaux mobiliers de M. L..., en application des dispositions de l’article 123 bis du CGI

M et Mme L... ont contesté, en vain, les suppléments d’impôt sur le revenu et de contributions sociales mis à leur charge devant le tribunal administratif de Paris, puis devant la cour administrative d’appel de Paris.

Leur pourvoi contre l’arrêt devant la CAA de Paris    a fait l’objet d’une décision d’admission partielle, pour ce qui concerne les conclusions relatives à l’imposition entre leurs mains des bénéfices réalisés par la société Stanmer Holdings Ltd

 I SUR LE REGIME PRIVILEGIE D UNE ENTITEE SOCIETE MERE ETRANGERE

Dans l’objectif de dissuader la délocalisation des grandes fortunes privées vers les paradis fiscaux, l’article 123 bis du CGI prévoit l’imposition des personnes physiques fiscalement domiciliées en France à raison des bénéfices ou revenus positifs réalisés par certaines structures de gestion du patrimoine implantées à l’étranger,

 Nous rappelons que le conseil d etat dans la décision Level One  Luxembourg  a jugé que les conditions de droit commun prévues par la loi interne incluent le régime des sociétés mères défini aux articles 145 et 216 du CGI.

Une SOPARFI luxembourgeoise n’est pas une société privilégiée au sens du 123bis CGI
(CE 14.02.22 Level One  Luxembourg  Conclusions  MERLOZ

Comme le precise le rapporteur public, cette décision  se fonde sur le fait que, bien qu’il ne s’agisse pas d’un régime spécial, le régime des sociétés mères, pérenne et harmonisé au niveau de l’Union européenne, a vocation à s’appliquer de manière très large à toutes les entreprises éligibles.

II SUR L’ASSIETTE D IMPOSITION

Mais comment déterminer l assiette de cette imposition ?

Le résultat comptable ou le résultat fiscal ??

Les modalités imposition des revenus entrant dans le champ du dispositif sont définies par le 3 de l’article 123 bis, qui répute acquis à la personne physique les bénéfices ou les revenus positifs de l’entité étrangère au premier jour du mois qui suit la clôture de son exercice, ou, à défaut, au dernier jour de l’année civile.

Ces bénéfices sont déterminés selon les règles fixées par le code général des impôts  comme si l’entité était imposable à l’impôt sur les sociétés en France, sous déduction, le cas échéant, de l’impôt acquitté par l’entité à l’étranger, à condition que celui-ci soit comparable à l’impôt sur les sociétés

arrêt n° 20PA00247 de la CAA  de Paris du 3 décembre 2020

Conseil d etat 449408 9ème - 10ème cr 21 juin 2022  Stanmer Gibraltat

Mme Céline Guibé, rapporteure publique

 

  • 7 Pour l'application de l'article 123 bis du code général des impôts (CGI), les bénéfices ou les revenus positifs d'une entité juridique établie ou constituée hors de France et soumise à un régime fiscal privilégié sont déterminés selon les règles du CGI comme si l'entité juridique était imposable à l'impôt sur les sociétés (IS) en France.
    Ces règles incluent le régime des sociétés mères défini aux articles 145 et 216 du CGI dès lors que l'entité juridique serait soumise totalement ou partiellement à l'IS au taux normal si elle était établie en France.

 

le conseil confirme la position du contribuable

Pour l’année 2010, l’administration fiscale a retenu une assiette imposable correspondant aux bénéfices comptables réalisés par la société Stanmer en 2009.
Devant la cour, les contribuables soutenaient que ce résultat comprenait des produits de participation qui devaient être retranchés du bénéfice imposable dès lors qu’ils auraient été éligibles au régime des sociétés mères si la société Stanmer avait été établie en France. qui, quoique non distribués, sont réputés constituer des revenus de capitaux mobiliers de ces personnes physiques, à hauteur de leur participation dans l’entité

Les contribuables  ajoutaient que les commentaires administratifs portant sur l’article 123 bis admettent  l’application du régime des sociétés mères pour la détermination des résultats de l’entité  étrangère lorsque les conditions requises par l’article 145 du CGI sont remplies (§ 88 de  l’instruction 5-I-1-00, reprise au § 320 de l’instruction BOI-RPPM-RCM-10-30-20-20).

17:36 | Lien permanent | Commentaires (0) |  Imprimer | |  Facebook | | | | |

Revirement de jurisprudence sur la discrimination à rebours ??? ( CE 23 JUIN 2022)

ARRET JP FISCALE.jpg

Pour recevoir la lettre EFI inscrivez vous en haut à droite
 Pour lire les  tribunes antérieures  cliquer 

 patrickmichaud@orange.fr

 

La discrimination à rebours est celle qui conduit à traiter plus favorablement une situation intra-européenne
qu’une situation française.

Discrimination a rebours : le conseil constitutionnel inflechit
sa jurisprudence pour preserver la souverainete fiscale francaise  
(3 avril 2020) par Olivier Fouquet

 

La situation de fait

D…, ressortissant Suisse résidant à Monaco, a acquitté la somme de 140 045 euros au titre du prélèvement prévu par l’article 244 bis Adu code général des impôts au taux de 33,1/3 % portant sur la plus-value immobilière qu’il a réalisée lors de la vente d’un immeuble à Nice le 20 mars 2012.

Au cours de l’instance devant le tribunal administratif de Nice, l’administration  a  prononcé un dégrèvement d’un montant de 60 219 euros correspondant à la réduction de l’imposition dont le montant est déterminé par l’application du taux de 19 %, identique à celui prévu par cet article pour les résidents d’un Etat membre de l’Union européenne ou d’un autre Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales.

Souhaitant obtenir la restitution de la totalité du prélèvement qu’il a acquitté, M. D… fait appel du jugement du 27 décembre 2018 en tant qu’après avoir pris acte du dégrèvement intervenu en cours d’instance, le tribunal administratif de Nice a rejeté le surplus de sa demande.

La position de la CAA et du CE 

La CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 30 juin 2020, 19MA01218 a confirmé

Ainsi que le conseil d etat

Conseil d'État  N° 445785 9me chambre 23 juin 2022

  1. Lorsqu'un contribuable non-résident conteste, au regard de la libre circulation des capitaux, l'imposition à laquelle il a été assujetti sur ses revenus de source française, il convient de comparer la charge fiscale supportée respectivement par ce contribuable et un contribuable résident de France placé dans une situation comparable. Lorsqu'il apparaît que le contribuable non-résident a été effectivement traité de manière défavorable, il appartient à l'administration fiscale et, le cas échéant, au juge de l'impôt, de dégrever l'imposition en litige dans la mesure nécessaire au rétablissement d'une équivalence de traitement

S AGIT IL D UN REVIREMENT DE JURISPRUDENCE ?

 La position  du contribuable était  fondée sur la décision AVM International Holding du 14 octobre  2020

lire l »analyse de CMS Francis Lefebvre

 (CE 14-10-2020 no 42152

CONCLUSIONS  de M. Laurent Domingo, rapporteur public  

 

le Conseil d’État avait conclu que les sociétés européennes ne doivent être soumises à aucune imposition sur leurs plus-values de cession de participations substantielles françaises en raison de la contrariété de l’article 244 bis B du CGI avec le droit de l’Union européenne (UE).

 

la méconnaissance du droit de l’UE par la loi fiscale devait entrainer la

décharge totale de l’imposition en litige.

Il s’ensuit une situation de discrimination à rebours 
qui ne peut être corrigée que par le législateur.

 

L affaire rendu  en juin  marque t elle un revirement de bon sens pour maintenir
une egalite entre le resident de France et le non resident  ??

10:48 | Tags : discrimination a rebours | Lien permanent | Commentaires (0) |  Imprimer | |  Facebook | | | | |