25 mars 2013

Article 155 A : l’arrêt de principe CE 20 mars 2013 eurodeal

 

 arret droit fiscal.jpgDans son arrêt de principe du 20 mars 2013, le conseil d’état apporte une nouvelle approche basée sur le principe de réalisme fiscal  sur l’application de l’article 155 A CGI qu’il estime compatible tant avec la liberté d’établissement communautaire qu’avec les traités fiscaux bilatéraux

 

L’article 155 A CGI 

BOFIP

Contribuables prêtant leur concours à des personnes
domiciliées ou établies hors de France
 

Les tribunes EFI sur l’article 155 A 

Les libertés communautaires   

Conseil d’État N° 346642 20 mars 2013 

 

La disposition de l’article 155 A CGI  permet de lutter contre le montage consistant pour un prestataire de services, tels les artistes et les sportifs, à apparaître juridiquement en qualité de salarié d'une société établie dans un paradis fiscal.

Les sommes destinées à rémunérer les prestations de certaines personnes (professionnels du sport et du spectacle, en particulier) ne sont pas versées directement à celles-ci, mais à des sociétés établies à l'étranger dont la fonction apparente consiste à fournir les services de ces personnes. 

 Cette pratique a pour conséquence de soustraire à l'application de l'impôt français la majeure partie des rémunérations en cause.


 

L'exemple type du détournement de l'impôt français est caractérisé dans le cas où la personne, domiciliée en France, prestataire de services accomplis en France ou à l'étranger, apparaît juridiquement en qualité de salarié d'une société établie hors de France et le plus souvent dans un pays où le niveau réel d'imposition est faible.

 

Un débat s’était instauré pour savoir si cette disposition n’était contraire ni à la liberté d »établissement communautaire et ni au principe de non double imposition prévu par les traites fiscaux

 

Dans son arrêt du 20 mars 2013, le conseil d’état a mis un terme à ce débat en utilisant le principe simple d’application de l’esprit de la loi et du réalisme  fiscal ce qui ne va pas plaire à notre professeur Tournesol

 

Par ailleurs l’analyse de cette disposition anti évasion permettra à l’administration de l’utiliser dans un plus grand nombre de situations  mais toujours sous réserve de la preuve contraire apporté par le contribuable

 

"Les dispositions de l’article 155 I  A du code général des impôts (CGI) visent uniquement l’imposition des services essentiellement rendus par une personne établie ou domiciliée en France et ne trouvant aucune contrepartie réelle dans une intervention propre d’une personne établie ou domiciliée hors de France. En l’absence d’une telle contrepartie permettant de regarder les services concernés comme rendus pour le compte de cette dernière personne, sa liberté de s’établir hors de France ne saurait être entravée du fait de ces dispositions." 

 

 La situation de fait

 

 

 M. et Mme C... ,domiciliés en france ,étaient tous deux salariés de la société Eurodeal International (EDI), dont le siège social est situé au Luxembourg ;

 

 M. C... en était administrateur délégué et actionnaire à hauteur de 50 % ;

 

dans le cadre d’une convention d’assistance administrative, commerciale et de gestion, la société EDI a facturé à la société Sateca, dont le siège est en France et dont M. C... est également associé, des prestations de services effectuées par plusieurs de ses salariés ;

 

la position de l’administration

 

à l’occasion d’un contrôle sur pièces des revenus de M. et Mme C... portant sur les années 1999 à 2001, consécutif à une vérification de comptabilité de la société Sateca, l’administration, faisant application des dispositions de l’article 155 A du code général des impôts, a réintégré dans les revenus de M. et Mme C... les sommes facturées par la société EDI à la société Sateca correspondant à des prestations d’assistance et pour lesquelles les factures mentionnaient soit une “ intervention de M. C... “, soit une “ intervention de Mme C... “ ;

 

 Sur l application de la convention franco luxembourgeoise

 

M. et Mme C... se prévalent de la convention franco-luxembourgeoise du 1er avril 1958, notamment de ses articles 14 et 15 ;

 Toutefois, il n’est pas contesté qu’ils ont, l’un et l’autre, leur domicile fiscal en France ; ainsi qu’il a été dit au point 6, les rémunérations en litige concernent des prestations de service rendues en France ;

par ailleurs, s’agissant d’un contribuable distinct, la circonstance, à la supposer établie, que la société EDI aurait déclaré les sommes litigieuses au titre de l’impôt sur les sociétés au Luxembourg n’est pas susceptible d’établir l’existence d’une double imposition des sommes en litige ;

Ainsi, M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que la convention franco-luxembourgeoise ferait obstacle à l’imposition en France de ces sommes ;

 

 

Article 2 : La requête d’appel de M. et Mme C... est rejetée.

 

 

 

La position du conseil

 

 

1) Les prestations dont la rémunération est susceptible, en application des dispositions du I de l’article 155 A du code général des impôts (CGI), d’être imposée entre les mains de la personne qui les a effectuées correspondent à un service rendu pour l’essentiel par elle et pour lequel la facturation par une personne domiciliée ou établie hors de France ne trouve aucune contrepartie réelle dans une intervention propre de cette dernière, permettant de regarder ce service comme ayant été rendu pour son compte.,,

 

2) Ainsi, les dispositions du I de l’article 155 A visent uniquement l’imposition des services essentiellement rendus par une personne établie ou domiciliée en France et ne trouvant aucune contrepartie réelle dans une intervention propre d’une personne établie ou domiciliée hors de France. En l’absence d’une telle contrepartie permettant de regarder les services concernés comme rendus pour le compte de cette dernière personne, sa liberté de s’établir hors de France ne saurait être entravée du fait de ces dispositions.,, 

 

3) L’administration fiscale apporte la preuve que des sommes perçues par une personne domiciliée ou établie hors de France en rémunération de services rendus par une ou plusieurs personnes domiciliées ou établies en France sont imposables au nom de ces dernières en vertu du I de l’article 155 A du code général des impôts (CGI) par la production d’éléments attestant de ce que ces personnes ont réalisé les prestations de services en cause et de ce qu’elles contrôlent la personne qui perçoit la rémunération de ces services. Dans l’hypothèse où l’administration s’acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au contribuable d’apporter des éléments permettant d’établir que la facturation de ces prestations par la société établie hors de France aurait trouvé une contrepartie réelle dans une intervention qui lui aurait été propre et de regarder le service ainsi rendu comme l’ayant été pour son compte.

 

 

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