05 mai 2013
Gestion normale ou anormale ? L’aff Rottapharm (CAA Paris 11.04.13)
la SAS Rottapharm, qui a pour activité le négoce de produits pharmaceutiques et parapharmaceutiques a pris en charge les frais de lancement et de promotion sur le marché français, au cours des exercices en litige, du produit Dermestril de la classe G3C des oestrogènes, utilisé dans le cadre du traitement hormonal substitutif (THS), dont le droit de distribution lui a été concédé par sa société mère, la société néerlandaise Rotta Research International, elle-même détenue par la société de droit italien Rottapharm SPA, représentant entre 55,26 % et 40,81 % du chiffre d’affaires de la spécialité au cours des années 1999 à 2002 ;
Par ailleurs ,la SAS Rottapharm, pour financer la prise en charge des frais de lancement et de promotion du produit Dermestril, a contracté un emprunt auprès d’une des sociétés du groupe Rottapharm, la société irlandaise Rotta Finance West Block IFSC établie à Dublin, pour un montant de 1 500 000 euros, moyennant des intérêts de 43 283 euros, 76 461 euros et 60 756 euros au titre des exercices clos respectivement en 2000, 2001 et 2002 ;
Cour administrative d’appel de Paris N° 11PA00847 11 avril 2013
Mme Helmholtz, président Mme Dhiver, rapporteur public
Les tribunes sur l acte anormal de gestion
Le rappel des principes de base
C’est au regard du seul intérêt propre de l’entreprise que l’administration, à qui il n’appartient toutefois pas de se prononcer sur l’opportunité du choix arrêté par une entreprise pour sa gestion, doit apprécier si les charges engagées correspondent à des actes de gestion commerciale normale ;
cet intérêt n’est pas méconnu lorsqu’une entreprise se livre à des opérations dans des conditions présentant pour elle un caractère avantageux ;
il en va autrement si, compte tenu des circonstances dans lesquelles elle intervient et de l’objet qu’elle poursuit, la comptabilisation d’une charge excède manifestement les risques qu’un chef d’entreprise peut, eu égard aux circonstances, être conduit à prendre, dans une situation normale, pour améliorer les résultats de son entreprise ;
position du vérificateur
à l’issue de la vérification de comptabilité de la SAS Rottapharm, l’administration a limité la déductibilité de ces frais dde lancement en retenant un taux moyen de 12 % en estimant que la part des dépenses excédant ce pourcentage n’avait pas été engagée dans l’intérêt propre de la société, mais dans celui du groupe Rottapharm qui lui avait demandé d’engager ces frais à un tarif imposé ne lui permettant pas de couvrir ses charges d’exploitation alors qu’elle était déficitaire ;
le service a aussi remis en cause la déductibilité desdits intérêts au motif que le recours à l’emprunt était la conséquence directe et exclusive de l’acte anormal de gestion procédant de la prise en charge par la SAS Rottapharm des frais de promotion du produit Dermestril, alors qu’elle ne disposait pas des ressources suffisantes pour les financer ;
Position de la société
4. la société requérante fait valoir qu’elle réalisait des bénéfices sur le produit Extranase pour lequel elle ne disposait d’aucune force de vente et était confrontée au déremboursement de ce produit et qu’elle devait, dès lors, se positionner sur un marché prometteur comme en atteste l’intérêt de différentes sociétés dans plusieurs pays à l’époque ;
Position de la cour
toutefois, elle ne justifie pas de l’importance des moyens de promotion mis en oeuvre en 1999 pour la distribution du seul produit Dermestril, d’ailleurs déjà commercialisé antérieurement et dont elle n’avait pas l’exclusivité dans un marché certes prometteur mais fortement concurrentiel, où la part de marché de ce produit n’était que de 6 % alors que le seuil de rentabilité qui aurait dû être atteint en 2002 imposait qu’elle doublât son chiffre d’affaires ;
Dès 1998, une première étude américaine citée par le ministre relevait les risques médicaux potentiels d’une utilisation du THS pour les femmes ménopausées, s’agissant notamment des maladies thromboemboliques et de vésicule biliaire, suivie d’autres études concordantes dont la dernière, en 2002, a mis en évidence les liens entre différentes pathologies notamment les cancers du sein et les accidents vasculaires cérébraux avec les traitements hormonaux substitutifs ;
la SAS Rottapharm ne justifie pas davantage la poursuite de l’engagement de dépenses de promotion d’un tel montant pour les années ultérieures, alors qu’à compter de la prise en charge de ces frais, ses résultats sont devenus structurellement déficitaires,
la progression du chiffre d’affaire annuel du produit Dermestril n’a été que de 14,7 % entre 1999 et 2000 et de 9 % entre 2000 et 2001 et qu’elle a dû recourir à un emprunt auprès d’une société irlandaise du même groupe à partir de l’année 2000 pour pouvoir financer les frais litigieux ;
ainsi, le service qui n’était pas tenu de retenir des termes de comparaison, établit que la prise en charge par la SAS Rottapharm des frais de promotion du produit Dermestril pour une part excédant 12 % de son chiffre d’affaires, qui correspond au taux moyen pour les entreprises du secteur pharmaceutique ainsi qu’il ressort de la lettre du 18 avril 2005 adressée à la société requérante par le directeur général adjoint de l’organisation syndicale des industries pharmaceutiques, a constitué un acte étranger à une gestion commerciale normale ;
à cet égard, la SAS Rottapharm ne saurait se prévaloir de la problématique des prix de transfert et de la méconnaissance de l’article 57 du code général des impôts sur lequel le service ne s’est pas fondé ;
enfin, en se bornant à soutenir que la prise en charge des frais de promotion du médicament Thais par la société Besins Iscovesco s’est effectuée dans des conditions relativement semblables, la SAS Rottapharm n’apporte aucun élément tendant à remettre en cause la limitation par le service du montant des frais de promotion en litige à 12 % de son chiffre d’affaires des exercices en litige ;
En ce qui concerne les frais financiers de l’emprunt contracté auprès de la société irlandaise Rotta Finance West Bloch IFSC :
6.il résulte ce qui vient d’être dit au point 4 que les frais de promotion du produit Dermestril engagés au-delà d’un certain montant ne relèvent pas d’une gestion commerciale normale ; que, par voie de conséquence, le recours à l’emprunt pour assurer de telles dépenses ne l’est pas davantage ; par suite, c’est à bon droit que le service a remis en cause la déduction des intérêts de cet emprunt et les a réintégrés dans les résultats imposables de la société des exercices clos de 2000 à 2002 ;
En ce qui concerne les frais de lancement et de promotion du produit Saugella :
la décision
il résulte de tout ce qui précède que la SAS Rottapharm n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande de décharge des impositions contestées et de rétablissement tant de ses déficits constatés que de la créance née du report en arrière de ses déficits ;
DECIDE :Article 1er : La requête de la SAS Rottapharm est rejetée.
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09:04 Publié dans Acte anormal de gestion | Tags : rottapharm (caa paris 11pa00847 11 avril 2013 | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook | | |
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