17 septembre 2009

Un abandon de créance peut il être une cession de fonds de commerce ?

disciplien.jpg L'abus de droit implicite

 

Les tribunes EFI sur l'abus de droit

 

Un abandon de créance peut il devenir une cession de fonds de commerce ?

 

Un des moyens souvent soulevé est de faire juger que l’administration a commis un erreur de droit en n’utilisant pas la procédure, protectrice pour le  contribuable, de l’abus de droit visé à l’article L64 LPF (applicable en 1995) et en conséquence de faire annuler une procédure de redressement sur le motif de l'existence d'un abus de droit implicite.

 

Sur la forme, la longue procédure engagée - sans succès- par la société Forocéan en est un exemple

 

Sur le fond, il convient de faire attention à ce qu’un abandon de créance peut, dans certaines situations, être considéré comme une acquisition de fonds de commerce imposable à l'époque à un droit d'enregistrement de 16.9%

 

 

Cour de cassation ch. Com. 16 décembre 2008 N° 08-11419

 

 

Cour d’appel de Toulouse 19 novembre 2007 N° 06/05321

 

 

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LES FAITS

 

Détentrice depuis 1993 de 20% du capital de la société Maugis qui exploitait à La Teste de Buch un supermarché sous l’enseigne Intermarché, la société Forocéan, qui exerçait la même activité sous la même enseigne dans la même commune a acquis, au mois de décembre 1995, 79% du capital de sa filiale en difficulté pour un franc symbolique.

 

Elle a parallèlement consenti en 1995 et 1997 des abandons de créances à la société Maugis qui a cessé son activité au mois de mars 1996.

 

A l’occasion d’une vérification de comptabilité de la société Forocéan, l’administration fiscale a considéré qu’il y avait ainsi eu mutation du fonds de commerce détenu par la société Maugis au profit de la société Forocéan à qui elle a notifié le 14 septembre 1998 un redressement de droits d’enregistrement calculés sur le montant des abandons de créance considérés comme prix de l’acquisition, qu’elle a mis en recouvrement le 24 mars 2000.


PROCEDURE

 

Après rejet le 20 septembre 2001 de sa réclamation, la société Forocéan a, par acte d’huissier du 30 novembre 2001, assigné la Direction générale des impôts devant le tribunal de grande instance de Bordeaux pour contester cette décision.

 

 

Par le jugement du 24 mars 2003, le tribunal, accueillant la contestation, a déclaré irrégulière la procédure suivie par l’administration fiscale et a prononcé la décharge des droits et pénalités résultant de l’avis de mise en recouvrement du 15 mars 2000, considérant que l’administration, qui soutient que sous couvert d’un abandon de créance la société FOROCÉAN avait dissimulé l’achat d’éléments d’un fonds de commerce et prétend ainsi rétablir à l’opération son caractère réel de cession de droits incorporels soumise à droits de mutation, aurait dû appliquer la procédure de répression des abus de droit prévue à l’article L.64 du Livre des procédures fiscales, avec les droits et garanties qui y sont attachés pour le contribuable.

 

 

Par un arrêt du 15 juin 2004, la cour d’appel de Bordeaux a confirmé cette décision, considérant que l’objet des abandons successifs de créance consentis avait bien été pour la société FOROCÉAN de se rendre seule porteuse des actions de la société Maugis afin de disposer des droits incorporels constituant le fonds qu’exploitait cette dernière en procédant à sa fermeture et d’obtenir de la commission départementale d’équipement commercial une autorisation d’extension qui lui avait été refusée jusque là, dissimulant le but véritablement poursuivi.

 

 

Cette décision a été cassée et annulée en toutes ses dispositions par un arrêt de la Cour de Cassation du 19 septembre 2006 rendu au visa de l’article L.64 du Livre des procédures fiscales au motif qu’en se déterminant ainsi sans préciser en quoi l’acquisition des actions de la société MAUGIS et les abandons de créance consentis à celle-ci pouvaient être considérés comme fictifs ou inspirés par le seul motif d’éluder ou d’atténuer l’impôt normalement dû, la cour d’appel n’avait pas légalement justifié sa décision.

 

 

La Direction générale des impôts a saisi la juridiction de renvoi par déclaration du 20 novembre 2006.

 

 

 

Aux termes de l’article L.64 du Livre des procédures fiscales afférent à la procédure de répression des abus de droit, ne peuvent être opposés à l’administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d’un contrat ou d’une convention à l’aide de clauses qui donnent ouverture à des droits d’enregistrement ou une taxe de publicité foncière moins élevés (...), l’administration étant en droit de restituer son véritable caractère à l’opération litigieuse ;

 

 

Or le fait que la structure juridique adoptée permette de réaliser une économie d’impôt par rapport à la charge fiscale qui aurait été supportée si une autre voie avait été suivie ne suffit pas à démontrer l’existence d’un abus de droit,

 

il est nécessaire que la situation juridique créée procède soit d’actes ayant un caractère fictif, soit à défaut d’actes qui n’ont pu être inspirés par aucun motif autre que celui d’éluder ou atténuer les charges fiscales que l’intéressé, s’il n’avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ;

 

la position de l’administration fiscale dans la notification de redressement est de soutenir que la prise de contrôle de l’entreprise lourdement déficitaire à la veille de cesser son activité avait eu pour objectif d’en capter la clientèle et d’obtenir au profit de la société Forocéan le transfert des surfaces de vente qu’elle exploitait, d’où il résulte que les coûts supportés du fait de la prise en charge de son passif correspondent en réalité au prix payé pour acquérir les éléments incorporels précédemment exploités par sa filiale ;

 

or ’il n’existe pas dans cette analyse l’imputation, même implicite, de l’existence d’actes dissimulant ou déguisant une acquisition, mais l’articulation de faits et leur mise en relation avec des actes qui réalisent en fait une telle acquisition qui n’a pas donné lieu à déclaration ;

 

ainsi dans cette analyse, les abandons de créance ont bien eu et conservé leur qualité juridique et provoqué l’extinction de la dette de la société Maugis, mais sont regardés comme revêtant une qualité supplémentaire, celle d’apporter une contrepartie, la possibilité de disposer du fonds de commerce ;

 

 

par conséquent  c’est à tort qu’il est soutenu que l’administration se serait placée implicitement mais nécessairement sur le terrain d’un abus de droit pour établir le redressement discuter, sans en respecter les contraintes procédurales ;

 

 

sur le fond,

 

il est constant que l’objectif poursuivi par le conseil d’administration de la société Forocéan en acquérant la quasi-totalité du capital social de la société Maugis puis en prenant en charge son passif était de procéder à la fermeture de cette surface de vente afin de récupérer à son profit une partie au moins de son chiffre d’affaires mais également d’obtenir plus facilement l’autorisation nécessaire à l’agrandissement de sa propre surface de vente afin d’être en mesure de réaliser ce supplément de chiffre d’affaires, et de la sorte faire son profit de ce qui pouvait être récupéré du fonds de commerce ;

 

c’est donc bien la possibilité de disposer du fonds de commerce qu’elle recherchait en vue d’en obtenir une contrepartie, et non pas seulement et principalement d’éviter un dépôt de bilan de la société Maugis pour préserver le renom de l’enseigne ;

 

 

l’administration est donc fondée en fait à soutenir que l’apurement de son passif en était le prix ;

 

 

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