Affaire n° 2010-12 concernant la société X France Holding.

 Affaire n° 2010-12 concernant la société X France Holding.

 

Une distribution de dividendes suivie d’une souscription d’un emprunt par la maison mère financé par compensation est elle un abus de droit ?

 

Au cours de l’année 2003, le groupe X a procédé à plusieurs restructurations de nature différente. Ainsi, la société de droit américain, tête de groupe, X Inc., a décidé de créer au Danemark une société holding au niveau européen, la société X Europe Holdings, pour gérer et coordonner les opérations de ses différentes filiales.

Dans ce cadre, la société X Inc. lui a apporté en décembre 2003 les titres de sa filiale française X France Holding, dont elle détenait 99,31 % du capital. Cet apport a été réalisé pour partie à titre onéreux pou rune somme de 315 millions d’euros et le surplus a été rémunéré par des titres de sa filiale danoise.

Le 29 décembre 2003, l’assemblée générale de la société X France Holding a décidé de procéder à une distribution exceptionnelle de dividendes d’un montant de 317 millions d’euros par prélèvement sur le poste « autres réserves », dont environ 315 millions d’euros au profit de son nouvel actionnaire, la société X Europe Holdings.

 

Au cours de la même assemblée générale, les actionnaires de la société X France Holding ont souscrit à l’émission par la société d’obligations remboursables en actions (ORA) pour une valeur de 317 millions d’euros dont ils ont libéré l’intégralité de la valeur nominale par compensation avec la créance détenue sur la société au titre de la distribution des dividendes qui venait d’être décidée.

Ces obligations, émises pour une durée de sept ans, sont rémunérées, conformément au contrat d’émission, par un intérêt fixé à un taux de marché Euribor  majoré de 50 points de base).

Toutefois, le montant des intérêts courus dus par l’émetteur est plafonné pour chaque exercice à la somme algébrique des résultats comptables de la société X France Holding et de ses filiales détenues à plus de 95 % avant impôts et intérêts dus au titre des ORA. La première échéance pour le paiement de ces intérêts est fixée au 29 décembre 2006, date du troisième anniversaire du contrat. Le 31 décembre 2003, les obligations détenues par la société X Europe Holdings sont cédées à la société X Inc. en compensation de sa dette de même montant résultant de l’apport à titre onéreux des titres de la société X France Holding.

Le 21 décembre 2004, la société X France Holding procède à une nouvelle distribution exceptionnelle d’un montant de 277 millions d’euros. L’administration a considéré que ces opérations étaient constitutives, sur le fondement de l’article L 64 du livre des procédures fiscales, de deux abus de droit distincts. Le premier abus de droit est fondé sur la fraude à la loi.

 

L’administration a estimé que, par le biais des décisions prises lors de l’assemblée générale du 29 décembre 2003, l’ensemble de ces opérations de distribution de réserves et d’endettement révélaient, compte tenu notamment des conditions de remboursement des ORA, un montage purement artificiel ayant eu pour but exclusivement fiscal de permettre à la société X France Holding de déduire de ses résultats les sommes correspondant aux intérêts dus au titre des ORA souscrites par ses actionnaires, alors que ces sommes constituent en réalité des dividendes et correspondent ainsi à une distribution de bénéfices non déductible. L’administration a ainsi requalifié les intérêts dus au titre des ORA en dividendes.

Elle a en conséquence rehaussé le résultat imposable à l’impôt sur les sociétés de la société X France Holding du montant de ces intérêts, s’élevant globalement à plus de 38,5 millions d’euros au titre des exercices clos respectivement en 2004,2005, 2006 et 2007.

L’administration a en effet constaté que cette opération avait produit, de manière différée, les mêmes effets qu’une incorporation de réserves au capital social, tout en permettant la déduction d’intérêts. Elle a considéré que la société X France Holding avait, par les deux décisions prises par l’assemblée générale du 29 décembre 2003, réalisé deux opérations de même montant et contradictoires : une distribution exceptionnelle et une émission d’ORA, réalisée en définitive, compte tenu de la cession immédiate des ORA parla filiale danoise, au profit de la même société, la société tête de groupe X Inc.. Elle a notamment relevé que ces opérations ne s’étaient traduites par aucun mouvement financier, les sommes prêtées n’ayant pas été versées dès lors qu’elles sont issues de la conversion de réserves en dettes, et que, dans la mesure où les intérêts dus au titre des ORA ne pouvaient excéder la somme algébrique des résultats comptables des sociétés du groupe français constitué par la société X France Holding et ses filiales détenues à plus de 95 %, ces intérêts présentaient les caractéristiques d’un dividende.

 

L’administration a constaté par ailleurs que la création de la société danoise était intervenue après la signature d’un protocole additionnel à la convention entre le Danemark et les Etats-Unis d’où il résulte qu’aucune retenue à la source n’est due au titre des dividendes versés à des sociétés américaines détenant au moins 80 % des droits de la société danoise distributrice.

L’administration a ainsi soumis la distribution opérée en décembre 2004 à la retenue à la source.

S’agissant de l’abus de droit en matière d’impôt sur les sociétés :

 

le Comité a déduit de l’ensemble des éléments ainsi portés à sa connaissance que les deux décisions prises le 29 décembre 2003 par l’assemblée générale ordinaire et extraordinaire de la société X France Holding forment un tout indissociable et sont constitutives d’un montage purement artificiel dont le but est exclusivement fiscal, en permettant la déduction, sous la forme d’intérêts versés à raison des ORA, de sommes ayant en réalité la nature de dividendes, et que ce montage va à l’encontre des objectifs poursuivis parle législateur lorsqu’il a autorisé par le 1 de l’article 39 du code général des impôts la déduction des charges financières, lesquelles doivent avoir été supportées à raison d’opérations d’endettement réel.

 

 S’agissant de l’abus de droit en matière de retenue à la source :

 

le Comité estime que les éléments portés à sa connaissance ne permettent pas de considérer que la société X Europe Holdings est dépourvue de substance et devrait ainsi être regardée comme fictive.

 

En conséquence, le Comité émet l’avis que l’administration n’est pas fondée à mettre en oeuvre la procédure de répression des abus de droit prévue à l’article L. 64 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction antérieure à la loi de finances rectificative pour 2008. »

 

Nota : l’administration a pris note de l’avis favorable de Comité en matière d’impôt sur les sociétés. S’agissant de l’abus de droit en matière de retenue à la source, l’administration s’est rangée à l’avis émis par le Comité.

 

 

 

 

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