15 juillet 2008

Modulation des sanctions : CEDH versus CE

a1cf181327293e5dc0c923150c8176a8.jpgLa position du conseil  d’état de ne pas prendre position sur le montant des c24ab8bb66aae183e42d69e63ee7d371.jpgamendes fiscales et de refuser de les  moduler est elle conforme à la jurisprudence de la cour de Strasbourg ?

Nous ne le pensons pas

 

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AFFAIRE SILVESTER'S HORECA SERVICE c. BELGIQUE

Cour Européenne des Droits de l’Homme

La position du conseil d'etat et de la cour de cassation

Un débat Olleon, Peronne et Michaud en février 2008

Le site de Jurisprudence de la CEDH

"Le fait pour une juridiction de se déclarer incompétente pour apprécier l ‘opportunité ou accorder une remise complète ou partielle  d’une amende fiscale est une violation de l’article 6§1  de la convention car la contribuable n’a pas eu la possibilité de soumettre la décision prise à son encontre à un contrôle de pleine juridiction"

 

La situation de fait

 

Suite à un contrôle effectué le 13 mars 1986 auprès de la société requérante, l'administration fiscale belge de la TVA dressa le 3 juin 1987 un procès-verbal des infractions constatées à la législation sur la TVA.

En l'occurrence, la société requérante avait omis d'établir des factures de certaines livraisons ou avait établi des factures qui ne correspondaient pas à la réalité, et elle avait manqué à son obligation de conserver certaines pièces et documents prévus par le code de la TVA. Le montant des amendes dues fut fixé, par application des dispositions pertinentes du code de la TVA, à 6 111 416 francs belges (BEF).

 


Le 3 octobre 1996, la cour d'appel de Bruxelles réforma le jugement du tribunal et déclara exécutoire la totalité de la contrainte du 15 décembre 1987 (portant sur un montant de 9 181 500 BEF). Elle estima en particulier que les amendes imposées à la société requérante étaient qualifiées par le code de la TVA d'amendes fiscales, par opposition aux peines correctionnelles qui supposaient une intention frauduleuse ou le dessein de nuire. Il en résultait qu'en l'absence de caractère pénal, les amendes imposées en l'espèce échappaient à l'application de l'article 6 de la Convention.
Dès lors, le pouvoir du juge en la matière se limitait à vérifier la réalité des infractions au code de la TVA et la légalité des amendes fiscales, sans qu'il puisse juger de leur opportunité ou en accorder la remise totale ou partielle.

La société requérante se pourvut en cassation, invoquant notamment une violation de l'article 6 de la Convention.

 Le 5 février 1999, la Cour de cassation rejeta le pourvoi

 

Position de la jurisprudence belge

La position de la jurisprudence belge quant à l'étendue du contrôle juridictionnel exercé de la sorte a évolué au cours des dernières années.

Traditionnellement, la jurisprudence considérait que les tribunaux n'avaient pas le pouvoir d'apprécier l'opportunité ou le montant de l'amende fiscale encourue, mais qu'il leur appartenait seulement d'apprécier la réalité de l'infraction constatée et la légalité de l'amende infligée.

 

Cette position a toutefois évolué à la suite principalement d'un arrêt préjudiciel de la Cour d'arbitrage du 24 février 1999, rendu dans une affaire similaire au cas d'espèce.et d’un arrêt du  12 juin 2002  

 

Position de la cour des droits de l homme  (CEDH)

 

Le Gouvernement belge ne conteste pas que l'article 6 de la Convention soit applicable en l'espèce.

 

La Cour ( CEDH) rappelle qu'un système d'amendes administratives imposées par l'administration ne se heurte pas à l'article 6 de la Convention pour autant que le contribuable puisse saisir de toute décision ainsi prise à son encontre un tribunal offrant les garanties de ce texte (Bendenoun c. France, arrêt du 24 février 1994, série A no 284, § 46).

 

Le respect de l'article 6 de la Convention suppose en effet que la décision d'une autorité administrative ne remplissant pas elle-même les conditions de l'article 6 § 1 subisse le contrôle ultérieur d'un organe judiciaire de pleine juridiction (Schmautzer, Umlauft, Gradinger, Pramstaller, Palaoro et Pfarrmeier c. Autriche, arrêts du 23 octobre 1995, série A no 328 A-C et 329 A-C, respectivement §§ 34, 37, 42, 39, 41 et 38).

 

Parmi les caractéristiques d'un organe judiciaire de pleine juridiction figure le pouvoir de réformer en tous points, en fait comme en droit, la décision entreprise, rendue par l'organe inférieur.

Il doit notamment avoir compétence pour se pencher sur toutes les questions de fait et de droit pertinentes pour le litige dont il se trouve saisi (Chevrol c. France, arrêt du 13 février 2003, § 77).

 

La Cour (CEDH) a dû constater qu'en l'espèce, la société requérante n'a pas eu la possibilité de soumettre la décision prise à son encontre à un tel contrôle de pleine juridiction.

 

Cette interprétation fut confirmée en son temps par la Cour de cassation belge qui rejeta, le 5 février 1999, le pourvoi aux motifs que le droit de contrôle exercé par le juge saisi d'une opposition à contrainte n'impliquait pas que ce juge puisse « exonérer le redevable des obligations qui lui sont légalement imposées par les autorités, uniquement pour des motifs d'opportunité ou d'équité ».

 

La Cour (CEDH) conclut dès lors que la société requérante n'a pas eu accès à un « tribunal » au sens de l'article 6  § 1 de la Convention  Recueil des arrêts et décisions 1996‑VI, §§ 54-55)

 

. Partant, il y a eu violation de ladite disposition. (voir, mutatis mutandis, Terra Woningen B.V. c. Pays‑Bas, arrêt du 17 décembre 1996,

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