15 décembre 2012

Abus de droit:le tour de magie de la SNC abusive

 touresol.jpgComite des abus de droit fiscal

Affaire n° 2012-35 et 2012-36 

comite-des-abus-de-droit-les-avis-publies-au-bofip.

Séance du 27 septembre 2012 : avis rendus par le comité de l’abus de droit fiscal commentés par l'administration (CADF/AC n°3/2012). 

L’administration vient de diffuser deux avis du comité des abus de droit sur un fabuleux montage à la Tournesol pour transformer des gains en pertes

Notre professeur pensait IL  avoir trouvé la pierre philosophale fiscale??

Le montage

La mise en application du montage

Les constatations de l’administration

La position du comite des abus de droit fiscal 


 Le montage 

Une SNC  X a été  créée entre une entreprise industrielle  E France et une  SAS Z, filiale d’un  groupe  financier P. 

La société E France s’est vue attribuer 110 parts (soit 5,37 % du capital) tandis que la société Z détenait le solde, soit 1 940 parts (soit 94,63 % du capital). 

 A cette occasion, le capital a été partiellement libéré à hauteur d’un montant de 11 388 000 euros : la société E France a libéré la  totalité de la valeur nominale de ses 110 parts sociales, soit 11 millions d’euros, tandis que la société Z ne libérait la valeur de ses 1 940 parts qu’à hauteur de 388 000 euros. 

Une clause statutaire prévoyait que le  bénéfice était reparti suivant le capital libéré et non le capital souscrit  et la SAS Z  et la société Z s’était engagée à racheter les Titres pour un prix déterminé après la clôture de X 

Aux termes de ses statuts mis à jour au 15 mars 2006, la société X a pour objet exclusif enFrance :

- l’acquisition auprès de P, de contrats optionnels au sens du 5 de l’article L. 211-1-II du code monétaire et financier sur l’indice CAC 40 dès lors qu’ils n’ont pas pour effet d’engager la société pour un montant total supérieur à 200 millions d’euros ;

- la conclusion avec P d’un contrat d’échange au sens du 3 de l’article L. 211-1-II du code monétaire et financier destiné à couvrir l’endettement financier contracté par la société ;

- la conclusion, en qualité d’emprunteur, d’un emprunt nominal de 189 millions d’euros auprès de la société E N, à échéance au 29 novembre 2006, dont le remboursement du nominal varie en fonction de l’évolution de l’indice CAC 40 ;

- et plus généralement, la conclusion de tout contrat et la réalisation de toutes autres opérations courantes strictement nécessaires à la réalisation de cet objet. 

La mise en application du montage 

Conformément aux clauses statutaires, un prêt de 189 millions d’euros, pour une durée allant du 15 mars 2006 au 29 novembre 2006, a été consenti par la société E N à la SNC X. Selon les termes du contrat de prêt, le prêteur souhaitait faciliter l’activité de l’emprunteur et lui permettre ainsi la réalisation d’investissements dans des instruments financiers à terme conformément à son objet social selon des conditions financières adaptées. Ce prêt était rémunéré au taux Euribor 8/9 mois majoré de 3 points et visait à offrir une rentabilité supérieure au marché monétaire en contrepartie d’un risque en capital en cas de réalisation d’un événement de marché lié à l’évolution de l’indice CAC 40. 

Pour le groupe E, l’investissement dans la SNC s’élevait donc à 200 millions d’euros, répartis entre un prêt de 189 millions d’euros par la société E  et une souscription au capital à hauteur de 11 millions d’euros par la société E France.

Au moyen des fonds ainsi apportés, la SNC X a conclu avec la société P neuf contrats d’options indexées sur le niveau de l’indice CAC 40 à la date de leur commencement le 15 mars 20 

Les constatations de l’administration 

L’administration a constaté 

- à la clôture de son exercice au 30 novembre 2006, le résultat bénéficiaire de la SNC X a été  affecté, sur le plan fiscal, à hauteur d’un montant d’environ 197 millions d’euros à la société E  France et le solde d’un montant d’environ 7 millions d’euros à la société Z, dès lors que la  répartition du bénéfice entre les associés était fixée par les clauses statutaires de cette SNC à  proportion du seul capital libéré ; 

-au 1er décembre 2006, soit après la clôture de l’exercice de la SNC X, la société E France a cédé  à la société Z les titres de cette société en exécution de la promesse de vente conclue le 15 mars  2006. -                                   

Cette cession a conduit à la constatation d’une plus-value comptable de 2,217 millions  d’euros par la société E France et d’une moins-value fiscale à court terme d’un montant de  195 millions d’euros. Cette moins-value a, conformément aux règles applicables en la matière, été  imputée immédiatement sur sa quote-part de bénéfice de la SNC X (197 millions d’euros), laissant  à la société E France un résultat imposable d’environ 2 200 000 euros correspondant à la plus value  économique. 

Il convient de rappeler que le bénéfice  aurait été de 197 M euros si le montage n’avait pas été réalisé !!!! 

Par une proposition de rectification en date du 22 décembre 2009, l’administration a considéré que  ces différentes opérations dissimulaient, sous une apparence juridique complexe, une simple  opération de placement sans risque à court terme de la trésorerie du groupe E et que ce montage  conduisait à l’application de manière littérale des règles d’imposition prévues pour les sociétés de  personnes aboutissant à un résultat contraire aux objectifs poursuivis par le législateur dans la  mesure où il a eu pour but exclusif de permettre à la société SNC X d’affecter partiellement à la  société Z son résultat déclaré et, par suite, a conduit à une non-imposition d’une fraction de ce  résultat à hauteur d’une somme d’environ 197 millions d’euros.  

L’administration a mis en oeuvre les  dispositions de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales relatives à l’abus de droit pour  remettre en cause ce montage et a estimé que le bénéfice de 204 millions d’euros de la SNC X  devait être intégralement attribué à la société Z.

 L a position du comite des abus de droit fiscal 

Le Comité constate ainsi que l’entrée de la société E France dans le capital de la SNC X, les modalités de souscription à l’augmentation de capital de cette SNC, les clauses statutaires de  répartition de son résultat, ainsi que les conditions fixées dans les promesses croisées d’achat et  de vente de ses parts permettaient d’attribuer artificiellement à la société E France la quasi-totalité  du bénéfice de cette SNC au titre de l’exercice clos en 2006, tout en neutralisant l’imposition  apparente par application des règles applicables en cas de cession de titres d’une société de  personnes, du fait de la cession des parts de la SNC prévue dès l’origine. 

- dès l’entrée de la société E France dans le capital de la SNC X, le 15 mars 2006, le bénéfice  devant être effectivement retiré par la société E France de cette opération était fixé à un montant  forfaitaire, indépendant du résultat de la SNC. En effet, les modalités de répartition des bénéfices,  prévues par les statuts de la SNC X, conduisant à affecter plus de 96 % de son résultat à la société  E France, étaient neutralisées par le jeu des promesses d’achat et de vente croisées, dès lors que  l’application de ces dernières aboutissait, en cas de résultat bénéficiaire, à attribuer, dès l’origine, à  la société E France une fraction du bénéfice égale à 2 217 000 euros (1,08 % du résultat de cette  7  SNC), soit la différence entre le montant de 13 217 000 euros et les 11 millions d’euros  représentant le remboursement des apports ; 

 Il estime que l’ensemble de ces opérations caractérise un montage qui, sous l’apparence  d’opérations présentant un intérêt autre que fiscal, a été inspiré, en réalité, par des motifs allant à  l’encontre des objectifs poursuivis par le législateur lors de l’adoption des dispositions des articles  8 et 218 bis du code général des impôts, lesquels tendent à l’imposition effective au nom des  associés d’une société de personnes des bénéfices réalisés à la date de clôture de l’exercice.   

En  effet, la société Z doit être regardée comme ayant poursuivi le but exclusivement fiscal de ne  soumettre à une imposition effective à son nom qu’une part très marginale de ce bénéfice eu  égard, d’une part, aux clauses statutaires de répartition du bénéfice fondées sur le capital libéré et,  d’autre part, à la rédaction des promesses d’achat et de vente qui, ainsi que cela était prévu dès  l’origine, conduisaient cette société à lever l’option concernant les titres de la SNC X, avant ou  après la clôture de l’exercice, suivant la situation de cette dernière société et permettaient ainsi, du  fait de la répartition du bénéfice, par une option exercée postérieurement à la clôture de l’exercice,  la fiscalisation apparente de ce bénéfice attribué à l’autre associé et en évitant, par suite, compte  tenu de ce montage, l’imposition effective du bénéfice réalisé dès la clôture de l’exercice.   

En conséquence, le Comité émet l’avis que l’administration était fondée à mettre en oeuvre la  procédure de l’abus de droit fiscal prévue à l’article L. 64 du livre des procédures fiscales.  Enfin, le Comité estime que la société Z doit être regardée comme ayant eu l’initiative principale du  montage constitutif de l’abus de droit et, en outre, en a été la principale bénéficiaire au sens du b)  de l’article 1729 du code général des impôts. Il émet donc l’avis que l’administration est fondée à  appliquer la majoration de 80 % prévue par ces dispositions.   

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